Voyage en Laponie Finlandaise

Raid dans le parc national Uhro Kekkonen
 

Samedi 15 mars : Peskihaara - Vieriharju (Carte)

Les jours rallongent et notre réveil est de plus en plus matinal. Nous nous élançons à 8h45 sur la piste de motoneige que j'ai parcourue lors de ma reconnaissance d'hier. Elle nous permet de sortir aisément de la forêt mais s'incurve ensuite vers une porte située trop au nord à mon goût.

Nous sortons donc de la trace et coupons au cap vers Mantoselkä.
La quinzaine de centimètres de neige récente recouvre une sous-couche transformée et bien dure. Les chiens peuvent progresser assez facilement, d'autant plus que je leur fais la trace !
 
Après la traversée d'un ruisseau, nous devons faire une halte pour mettre les peaux afin de pouvoir remonter un versant boisé.
Nous ne prenons hélas pas la précaution habituelle d'attacher les chiens, imaginant qu'ils n'iraient pas bien loin dans cette neige où ils enfoncent.
C'est sous-estimer Taïga qui même au prix de gros efforts ne peut s'empêcher de pister les nombreuses traces d'animaux présentes dans le secteur.
Nous l'appelons sans succès ; je tente de suivre ses empreintes mais elle a tant tourné et viré que son cheminement est impossible à décrypter.

Nous avons une fois de plus la confirmation qu'il est impossible de lui faire confiance. Elle est mignonne et affectueuse, mais possède également le don de nous énerver.
Aussi, nous décidons de repartir sans elle : si elle tient un peu à ses croquettes elle nous rejoindra en suivant nos traces ; et si ma foi elle préfère chasser, ce sera son destin : morte de froid ou de faim ou encore dévorée par un loup ou un glouton... 

Nous jetons régulièrement un coup d'œil derrière partagés entre la colère et un mélange d'inquiétude et de remords. Au bout d'une bonne demi-heure (1,5 km parcourus), Sylvie m'annonce que l'indisciplinée est de retour. Comme quoi, nous avons bien fait de ne pas l'attendre...

Peu de temps après, nous buttons sur la clôture à rennes alors que le refuge est seulement à 300 mètres. Au profit d'un endroit où le grillage est bas nous faisons passer les pulkas et les chiens par-dessus. Il n'y a qu'environ 60 cm à sauter mais comme ils n'ont pas d'appui suffisant sur la neige pour s'élancer, nous devons les aider et imaginons que Taïga n'aurait pas pu passer seule.


Nous voici à Mantoselkä et en faisons le tour.
 
 

         
Le refuge abritant une partie réservable et une partie libre a été récemment restauré comme en témoigne l'équipement intérieur.
 

                   
Un coup d'œil dans le cahier nous renseigne sur la date de la dernière présence. Facilement repérable, le dessin des lagopèdes nous est maintenant familier. Sans pour autant suivre exactement le même itinéraire, nous passons régulièrement dans les mêmes lieux que ces finlandais qui effectuent aussi une randonnée assez longue dans le parc.
 
 

                   
La cabane abritant les toilettes a fière allure et paraît encore plus récente.
 

                   
L'intérieur est nickel et luxe suprême : une large fenêtre permet au soleil de pénétrer à l'intérieur !
 

                   
Il n'est que 11h30 et nous décidons de poursuivre jusqu'à Manto-oja distant de seulement un kilomètre.
 

L'équipement sommaire et l'ancienneté de ce petit refuge qui contraste avec Mantoselka est à nos yeux très charmant. Les poutres de la paillasse taillées à la hache témoignent de son grand âge.
 

         
La hauteur des tables qui a évolué dans le temps avec celle de l'homme constitue un autre indice : ici, j'ai vraiment du mal à rentrer mes genoux en dessous.
Cela ne nous empêche pas de déjeuner agréablement en contemplant le décor enneigé par la fenêtre.
 
Nous reprenons la direction de Vieriharju en suivant une trace de motoneige qui longe la clôture à rennes. A la première porte, nous bifurquons et tirons au cap vers le refuge que nous atteignons après le franchissement d'une petite colline.


Il est équipé d'un sauna que je m'empresse de mettre en chauffe. La cabane à bois est bien approvisionnée et dispose d'une scie pour une fois bien affûtée.
Après ces douze jours de raid, la fatigue commence à se faire sentir et le sauna n'en sera que plus apprécié. La petite rivière coulant à proximité parait suffisamment profonde pour s'immerger : je pourrai donc l'agrémenter d'une petite baignade ! 
 
Oui, je sais, certains penseront que je suis fou... Comme d'autres penseront que je suis courageux... Cela m'importe peu.

Ce genre d'expérience me plaît et me motive, et n'étonnera pas outre mesure ceux qui me connaissent. Je suis plutôt non-conformiste et avoue même éprouver une certaine satisfaction à effectuer ces petites "excentricités" auxquelles beaucoup renoncent (Sylvie la première) convaincus que c'est contre nature à force d'avoir maintes fois entendu des paroles comme : « Couvre-toi, tu vas tomber malade ».

Pour se baigner dans un ruisseau en plein hiver, il faut maîtriser ses pensées et contenir son instinct ; y parvenir est mon premier plaisir.
Je considère aussi cela comme une expérience qui pourrait me servir, à au moins ne pas paniquer, en cas de baignade involontaire.

Allez, je vous invite à me suivre... !

Vous êtes à l'intérieur du sauna, il fait environ 80°, la sueur ruisselle sur votre corps, bref vous avez chaud au point qu'un petit bol d'air frais ne vous déplairait pas.
Vous sortez, vous appréciez l'air frais pendant 15 à 20 secondes puis votre tête vous invite à rentrer bien au chaud.
Vous parvenez à chasser cette pensée et vous vous sentez de nouveau bien dehors. C'est le moment ou jamais de prendre la direction du ruisseau. A la moitié du chemin tracé dans la neige, qui mystérieusement n'est pas rectiligne, vos pieds tirent la sonnette d'alarme. Vous êtes tentés de faire demi-tour mais la berge n'est plus qu'à quelques mètres, pas question de se dégonfler. L'eau est claire, vous voyez la couche de sable en bas de l'échelle dont le premier barreau est gelé. Cela vous fait à nouveau hésiter mais comme les autres ne le sont pas, vous vous rassurez et vous en concluez qu'il doit faire meilleur dedans que dehors !
Vous y êtes, vous entrez les pieds dans l'eau et comme espéré dans ces derniers instants, ils vous remercient : l'eau leur parait plus chaude que la neige.
Debout sur le sable, eau à mi-cuisses, il suffit maintenant de fléchir les genoux et de se pencher en avant. La sensation de froid n'est pas violente, la respiration n'est pas coupée, vous pouvez parler. Cependant vous sentez que le froid vous pénètre, vous faites quelques mouvements, tournez et visez l'échelle.


Vous vous étiez simplement préparé à vous immerger mais pas à y rester longtemps. Ce sera pour une prochaine fois, il faut aussi savoir ne pas brûler les étapes.
 
Juste le temps pour la photographe d'immortaliser l'instant et vous sortez. Vos pieds qui retrouvent le froid de la neige vous pousseraient à courir vers le sauna. Mais vous êtes serein et maîtrisez à nouveau votre instinct.
De toute façon, le reste de votre corps n'est pas si pressé ; il ressent de nouvelles sensations, pas spécialement désagréables que votre esprit cherche à expliquer :
Les petits picotements sont certainement dus à la vasoconstriction ou à l'effet réactionnel de vasodilatation qui s'en suit et provoque une augmentation du débit sanguin. Quant au tiraillement cutané, il provient à coup sûr des gouttes d'eau qui gèlent sur votre corps. Cela vous fait penser que si vous étiez habillé, il faudrait vous dévêtir rapidement avant que vos vêtements ne vous emprisonnent. Mais là, pas de risque, vous êtes nu comme un ver !
Ça y est, vous ouvrez la porte, l'air chaud vous parvient agréablement, vous reprenez place le plus haut possible. Rapidement le visage se réchauffe vous ne tremblez pas, n'avez pas la sensation de froid mais vous ressentez toujours ses picotements en profondeur dans votre chair, comme un massage... Il y a bien aussi un plaisir physique, même si le plaisir intellectuel prédomine. Allez ! On se réchauffe et on y retourne...


Ayant fait le plein de bien-être et d’harmonie intérieure, à la nuit tombée il en sort enfin !
 
Voilà, rien d'extraordinaire, simplement la certitude que non seulement notre corps est capable de s'adapter aux variations de température, mais qu'en plus c'est bon pour lui. En effet, le froid peut être notre allié, si nous le décidons : en agissant par exemple sur la circulation, il améliore la récupération, libère des endorphines (diminution de la douleur et du stress) et augmente les lymphocytes qui jouent un rôle majeur dans le système immunitaire...
 

Longueur étape 12,6 Durée de l'étape 6h25 Durée hors pauses 3h50 Dénivelé positif +120
Altitude de départ 280 Altitude maxi 305 Altitude d'arrivée 255 Dénivelé négatif -145

 


 

    Dernière modification le 31/07/2014

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