Voyage en Laponie Finlandaise

Petite boucle au départ d'Ansakämppä

ou les mésaventures d'Ilouliak

J'ai décidé de partir avec Taïga qui comme moi a besoin de se défouler. J'explique à Ilouliak qu'il reste pour se reposer et pour tenir compagnie à sa maîtresse.

Il ne semble pas comprendre l'importance de sa mission et se met à pleurer lorsqu'il me voit partir avec Taïga. Celle-ci refuse d'avancer comme pour attendre Ilou et Sylvie.
Ça commence bien !

Sylvie qui assiste à la scène me dit qu'elle peut très bien rester seule et que je n'ai qu'à prendre les deux.

J'attache donc les deux loulous ensemble et nous voilà partis à un bon train. C'est un régal durant deux kilomètres mais ensuite, les chiens commencent à se dissiper et à flairer à droite et à gauche...


Une petite pause et je reprends les choses en main.
Taïga se remet à tracter fort et c'est une bonne chose car le chemin amorce une montée.
Grâce à elle nous parvenons facilement sur le plateau.

Au niveau d'un campfire, je quitte la piste qui mène au prochain refuge (Jussin Kämppa) pour redescendre vers la rivière.
      

 

La descente est assez raide et les malas s'en donnent à cœur joie.

Comme ils s'aperçoivent que ce n'est pas leur vitesse qui va me désarçonner, Taïga sort son Joker : une trace à sentir sur la droite, elle bourre Ilou sur le côté et stoppe violemment.
C'est gagné, j'ai le cul dans la neige et l'action est dans le viseur de l'appareil !

(Si la vidéo ne se lance pas, la voici au format WMV ou ZIP)

  



Nous arrivons à un "Lean-to" situé au bord de la rivière. Je l'avais repéré sur la carte, matérialisant le lieu où je devais changer de rive.

J'attache les chiens et vais sonder le passage car avec le redoux de ces derniers jours, il faut se méfier.
 


      

Ça passe, la neige n'est pas humide.
Le temps de faire quelques photos et je retourne chercher les chiens.
Ils passent devant et suivent ma trace quand soudain ils font un brusque écart sur la gauche. Leurs pattes portent moins que mes skis et ils ont touché l'eau qui remonte instantanément dans la neige.

- "Aller devant, on ne traîne pas ici."

La rive est rapidement atteinte, mais mes skis pèsent une tonne : une épaisse couche de glace et de neige s'accroche à la semelle. Je dois déchausser et les frotter contre l'écorce d'un arbre pour parvenir à m'en débarrasser.


La piste que j'avais vue sur la carte est bien présente et comme je l'avais imaginé, elle a été pratiquée par une motoneige.
Même avec ce qu'il est tombé ces derniers jours, ça permet aux chiens de progresser presque normalement.

Sur le GPS, je guette le méandre qu'il faudra que je rejoigne pour regagner le refuge.

Nous y sommes.
Je quitte donc la piste et me dirige entre les arbres en direction de la rivière. Les chiens ont du mal à avancer de front, il me faut les détacher provisoirement. Je décroche la neck-line (lien qui relie les chiens par le collier) côté Taïga et la laisse pendre au collier d'Ilouliak.

Nous parvenons à la rivière et je cherche un endroit propice pour y descendre.

Soudain, Ilouliak se met à hurler. Taïga se retourne et lui donne quelques coups de patte affectueux sur le museau. Ça m'émeut et me confirme qu'il a poussé un réel cri de détresse. Je saisis rapidement qu'à cause de la neige, il a levé la patte suffisamment haut pour marcher sur la neck-line et par manque de chance, le doigt du mousqueton semble s'être pris entre ses doigts.

La grande qualité d'Ilouliak est de me faire confiance dans les situations délicates. Il me laisse prendre sa patte pour l'examiner : pas de sang, c'est déjà ça.
Je tente donc d'extraire ce fichu mousqueton, mais aussitôt Ilou se remet à hurler. Lorsque j'insiste, il montre les dents et grogne. J'arrête, le rassure et tente à nouveau. Même résultat, la douleur est vraisemblablement trop forte pour qu'il continue à me faire confiance !

Ne pas paniquer, ne pas s'énerver, agir rapidement sans focaliser sur le fait que cet incident risque de compromettre le raid que nous devons entreprendre d'ici quelques jours.

Avec un mousqueton classique en bronze, ce ne serait pas arrivé mais cette neck-line est équipée de nouveaux mousquetons, plus résistants et moins chers.
A l'usage, j'ai déjà constaté qu'ils étaient moins pratiques à manipuler et je découvre maintenant un nouvel inconvénient.
Voyez les photos : crochet pointu, doigt court rendant l'ouverture difficile.
Imaginez ça coincé entre deux phalanges d'un Malamute poilu. Impossible à extraire facilement.

Il me faudrait déjà des ciseaux pour couper les poils et y voir plus clair. Une sangle serait plus efficace que la ligne de trait pour confectionner une muselière, mais je n'ai rien pris de tout ça...

Comme heureusement je suis à moins d'un kilomètre du refuge, je décide de laisser les chiens seuls et d'aller chercher ce qu'il me faut.
- "Pas bouger, je reviens." Je fais quelques pas pour m'éloigner mais Ilou prend appui sur sa patte pour tenter de me suivre. Il hurle. Je retourne vers lui pour le rassurer :
- "Pas bouger mon chien, je reviens."
- "Il faut que tu me fasses confiance."
- "Pas bouger mon loulou, pas bouger, je reviens."
- "Toi non plus Taïga, pas bouger, tu tiens compagnie à Ilouliak."
J'hésite à la laisser car elle a tendance à sectionner ses liens ou à s'entortiller les pattes, mais je pense que c'est mieux pour Ilou.


Je pars et cette fois, les chiens restent calmes. Je dévale sur le cul le talus qui me sépare de la rivière et tente de trouver le meilleur tracé sur la neige pour éviter le contact avec l'eau. Au début, je sens la glace sous mes skis et je progresse assez bien, mais plus loin, en plein soleil, la neige est trempée et mes skis pèsent à nouveau une tonne.
Par expérience, je sais que c'est quand on veut aller trop vite que l'on commet des erreurs que l'on se met en danger. Je rage de progresser aussi lentement, mais m'efforce de le faire en douceur.

Tant bien que mal, j'arrive au refuge et tout en prenant ce qu'il faut, j'explique à Sylvie ce qu'il s'est passé. Elle s'empresse de s'équiper pour venir avec moi.
La tentation de reprendre la trace faite à l'aller est grande, mais il vaut mieux éviter de repasser dans la zone humide.
Pour qu'Ilou ne s'excite pas en nous sentant revenir, je cris de temps en temps :
- "Pas bouger, on arrive, pas bouger."

Je ne sais pas si les chiens ont la notion du temps, mais il s'est écoulé 30 minutes lorsque nous les rejoignons. Ilou est calme, Taïga n'a pas mangé son lien mais a la patte ficelée. Je m'occupe de la démêler en vitesse pour éviter que ça se transforme en garrot.
Sylvie rassure Ilou pendant que je lui coupe les poils entre les coussinets.
Je lui fabrique ensuite une muselière de fortune.
Tout en continuant à le rassurer, elle le maintient allongé et m'aide à tenir sa patte.
Il faut que j'y aille franchement et que je réussisse du premier ou au pire du second coup.
J'y vais. Il se débat, pleure, grogne, essaie de mordre (merci la sangle).
Soulagement, je l'ai eu : Ilou est libéré et retrouve instantanément son calme. Il ne saigne pas, mais par précaution, Sylvie lui arrose le pied de bétadine.

Avec un peu d'inquiétude, nous attendons de voir s'il boîte. A notre grand soulagement, il n'en est rien et va chahuter avec Taïga.



Dernière modification le 17/06/2011

Haut

Site motorisé par    ZitePLUS 0.9.1                   Connexion    ---     Déconnexion